Accueil › Les prieurés et leurs missions › Prieure N-D du Tchad (Bitkine -Tchad) › Articles › Le Tchad dans tous ses états...

Quelle surprise en traversant N'Djamena le matin du 31 janvier, de voir la transformation de la ville, du moins les rues et boulevards principaux.. Cinquantenaire de l'Indépendance oblige... .la place de la Nation, ex place de l'indépendance où se trouve d'ailleurs la cathédrale, avec ses lumières, ses colonnes et le reste, les ronds-points, les monuments et même en certains endroits les jets d'eau semblent presque irréels et pourtant, c'est vrai... Tout le long des avenues, les maisons "en dur" remplacent les maisons en terre, tout a été détruit et continue à l'être. Ceux qui en avaient les moyens ont pu reconstruire en pierre...les autres ? sont partis plus loin, grossissant le nombre de ceux qui n'ont rien ou presque !...Étonnement suprême :  les rues, les places, les lieux de marché, hauts en couleur, et où l'année dernière fleurissaient des milliers et des milliers de "lédas" (sacs plastique) noirs, laissent paraitre une propreté incroyable... Tandis que la France, comme le disent les journaux, s'interroge sur la suppression ou non de ces mêmes sacs... le Tchad, pays pauvre par excellence a fait disparaitre les "lédas" de la capitale... Pas encore du reste du pays...mais il faut garder espoir...

Pendant toute la première quinzaine de ce mois de Février, les villes et villages étaient dans tous leurs états... En effet le dimanche 13 février avaient lieu les élections législatives... les partis divers et surtout le MPS parti du Président s'activaient d'une façon incroyable... dans tous les quartiers et dans tous les villages de brousse, on se bousculait devant les bureaux. Les femmes en tenue de fête, les hommes, les enfants, faisaient continuellement la fête...on se pressait dans les rues. Musique, chants et danses, sauf  à  l'heure de la sieste ou de la prière, entretenaient un joyeux tapage... La distribution de billets de banque rendait ces rencontres encore plus attractives ! Que se passait-il dans les consciences des gens...Nul ne peut le dire ...

Année après année que dire de Bitkine ? Apparemment, rien ne change...les rues sont toujours aussi encombrées.  Il faut naviguer entre les rochers, les tas de terre, les restes des ordures brûlées et  les animaux , chèvres, moutons, poules qui ont la priorité.... Il n'y a ni électricité, ni eau,  même si dans la rue principale de Bitkine, la magnifique maison d'un ancien ministre, brille de tous ses feux dès la nuit tombée et laisse apparaître ses vertes pelouses !... La pompe du collège et celle du prieuré qui ont demandé des forages de plus de trente mètres continuent à aider les gens du quartier, un peu dans le désordre, à s'approvisionner en eau - il faut mettre des règles, difficiles à faire observer !  

Et la communauté ? Elle poursuit  avec courage un chemin passionnant mais difficile. La vie à Bitkine est dure...N'Djamena est à 500km. Même si la piste peu à peu se transforme en une belle route, il faut du temps pour un aller-retour et ce n'est pas souvent que l'on peut y aller faire des courses qui amélioreront l'ordinaire. Pour  nous qui en France sommes blasés sur la nourriture et le reste, l'émerveillement de la communauté à l'arrivée de l'une ou l'autre de France avec toutes sortes de provisions est beau à voir... Ses activités sont nombreuses entre le collège, la catéchèse, la participation à la vie du foyer paroissial ouvert pour que des jeunes catholiques de brousse puissent vivre leur scolarité au collège Joséphine Bakhita, la Compagnie de Guides  à qui nous avons pu remettre les premiers foulards... Leur fierté et leur joie n'ont pas de mots pour s'exprimer. Le climat est éprouvant, en ce début de février et ce n'est pas encore  la  période la plus chaude, la température a atteint les 40° à l'ombre bien sûr... Quelques jeunes africaines, des Congos et du Tchad,  viennent pour vivre un temps en communauté et étudier leur vocation. Il faut laisser du temps au temps, comme on le dit... "Prions le Maître de la Moisson d'envoyer des ouvriers à sa moisson" comme Jésus nous le recommande.

Et le collège Joséphine Bakhita ? Il porte bien son nom "la Maison de la joie". Les 130 élèves de tous âges parfois même fiancées, mariées et mères de famille, étudient avec beaucoup de sérieux, conscientes de la chance qu'elles ont de préparer ainsi un avenir différent... Comme chaque année à la même époque la fête de Joséphine Bakhita, s'est déroulée dans une joie presque indescriptible. Bien préparée par chaque classe à travers chants, scénettes, textes porteurs de messages, elle a rassemblé une foule bigarrée et participante. Heureuse récompense de beaucoup de travail de préparation... auquel non seulement la communauté, mais Garbé, Moussa, Amos, Abdoulaye et les autres, ainsi que Noëlle et  Rosette qui se sont donnés pleinement pour la joie de tous.

Au moment où j'écris cet article, le monde arabe est en ébullition et en recherche de liberté. Nous ne pouvons que prier le Dieu de la Paix, Dieu le Miséricordieux, Dieu le Compatissant  et là où nous sommes d'être des artisans de paix...