Une distinction bien méritée...

... les palmes académiques

Du 10 au 17 septembre, Mère Madeleine, prieure générale, est allée visiter la communauté de Taybeh et la maison de Jérusalem... L'émotion de se retrouver dans les Lieux Saints , Sainte Croix de Jérusalem, la possibilité de prier longuement, au lieu du Calvaire, au milieu d'une foule bigarrée et malheureusement bruyante, malgré l'effort du gardien orthodoxe, se révèlent toujours aussi poignantes...

Au milieu des rendez vous divers, avec le père Collin, jusqu'à maintenant exarque Chaldéen, grâce à qui nous avons un pied à terre à Jérusalem, Mgr William Shomali, évêque auxiliaire du Patriarchat latin, sa Béatitude Mgr Sabbah, patriarche émérite qui vit la moitié de la semaine à Jérusalem et l'autre moitié à Taybeh, le point central fut la remise des Palmes Académiques à soeur Claudine. Beaucoup de monde, familles, jeunes, enfants, personnalités religieuses et civiles,  se réunirent sur la place de l'Eglise de Taybeh, ce mardi soir, 13 septembre pour cette cérémonie. De nombreux discours, où chacun put exprimer sa reconnaissance envers le travail de soeur Claudine pour aider les jeunes Palestiniens à l'apprentissage du Français.

Le Consul retraça le chemin parcouru par soeur Claudine, insistant sur l'oeuvre du père Jacques Sevin et sur l'apport du scoutisme et de la Pédagogie scoute: 

Béatitude, Monsieur le Maire, Chères Sœurs et chers Pères, Monsieur le Directeur, Chers amis,

C’est un grand plaisir pour mes collègues et moi-même d’être parmi vous aujourd’hui à Taybeh afin de rendre hommage à l’une des figures de votre village même si je sais, chère sœur Claudine, car il s’agit bien de vous, que la modestie qui vous honore risque d’en souffrir…Car, oui, vous êtes devenue une des figures de ce village chrétien de Palestine. Qui aurait pu le dire, quand vous étiez enfant et peut être Jeannette dans le Val de Marne, dire que votre foi et votre amour des enfants vous amèneraient un jour à parcourir le monde entier et à devenir une des ces images fortes de la Terre Sainte que quiconque a eu la chance de vous croiser emportera avec lui ? Après un parcours d’enfant certainement sage en banlieue parisienne vous vous destinez rapidement à l’enseignement ; à l’enseignement de la couture d’abord, mais aussi à l’enseignement de la foi chrétienne, après vos études à l’Institut catholique de Paris.

Cette vocation pour l’éducation des jeunes, c’est très probablement à votre rencontre avec le scoutisme que vous la devez. Très marquée par l’expérience de vie forte que tout scout connaît bien, par les intuitions et la spiritualité du Père Jacques Sevin, un des fondateurs des Scouts de France, par tout ce que la loi scoute - on dirait aujourd’hui la « pédagogie scoute » - apporte d’épanouissement et de joie, vous devenez en 1967 Sœur de la Sainte Croix de Jérusalem, cette même Sainte Croix de Jérusalem que le Père Sevin avait choisie comme emblème pour tous les Scouts de France. Et c’est chez vos sœurs que s’épanouiront vos talents d’enseignante, d’animatrice et même aussi d’artiste. Car enseignante et pédagogue, vous l’êtes sans aucun conteste avec le sens particulier du jeu et de la joie que la spiritualité scoute a mis au centre de ses valeurs.

Les scouts campent et décampent, et votre vie de sœur de la Sainte Croix de Jérusalem se devait nécessairement d’être un peu nomade. Si vous êtes restée de nombreuses années en France, vous avez aussi enseigné deux ans au Tchad et vous voici depuis plus de 10 ans en Terre Sainte, à Taybeh, où vous avez pris en charge l’enseignement du français au sein de l’école du patriarcat latin de Jérusalem. Il n’est pas tellement surprenant qu’une sœur de la Sainte Croix de Jérusalem soit appelée à servir en Terre Sainte. Mais je peux dire aussi que votre parcours, dussiez-vous en rougir, illustre bien ce qu’a été l’histoire de la France en Palestine depuis le milieu du XIXème siècle. Comment ne pas évoquer et saluer à travers votre exemple celui de toutes les institutions religieuses françaises de Palestine qu’elles soient écoles, hôpitaux, monastères, lieu d’accueil des pèlerins, lieux d’enseignement supérieur et de recherche, qui ont arrimé encore plus notre pays à cette terre palestinienne à la dimension historique et spirituelle si forte et malheureusement toujours en conflit.Mais tout en étant proche de cette région qui souffre, votre témoignage est un exemple lumineux. Cet exemple lumineux, les enfants en sont les premiers bénéficiaires et ils ont bien de la chance. Cette énergie quotidienne que vous ne cessez de déployer, ce sens de la curiosité et de l’animation, cette joie d’apprendre tout en jouant, vous les mettez autant au service des enfants et des adolescents, au cours notamment de ces fameux camps que vous animez chaque été avec de jeunes volontaires venus de France, et auxquels je souhaite rendre hommage, qu’au service de l’enseignement du français. Pour vous les deux vont ensemble. Ou à l’occasion des voyages de découverte en France que vous organisez pour vos lauréats du Delf, ce diplôme de français destiné aux étudiants étrangers. Avec vous et grâce à vous, chère Soeur Claudine, notre langue française ne risque pas de vieillir. Et en tout cas pas en Palestine. Et en tout cas pas au Patriarcat latin de Jérusalem.

Chère Sœur Claudine, Comment vous dire ce que les enfants palestiniens, vos collègues, notre langue française, notre pays-même et cette Terre qui est un peu la vôtre vous doivent? Peut-être en citant ces mots de la prière scoute, cette prière de Saint Ignace de Loyola que le Père Sevin avait dédiée aux Scouts de France et qui nous rappelle qu’il y a encore beaucoup à faire :  "Apprenez-nous à être généreux, à donner sans compter, à travailler sans chercher le repos ». Parce que vous incarnez ces valeurs, que vous les défendez et les promouvez, parce que vous donnez le meilleur de vous-même, c’est à dire le meilleur de ce que la France peut offrir, parce qu’ici en Palestine, vous êtes un exemple des liens humains qui nous unissent à la population, les autorités françaises ont souhaité vous honorer, et à travers votre personne tout ceux qui partagent votre mission. Et je ne doute pas que tous ceux qui ont bénéficié de votre attention et portent témoignage de vos qualités s’associent à cet hommage.

Claudine Oudart, au nom du ministre de l’Education nationale, Nous vous faisons Chevalier dans l’Ordre des Palmes Académiques.

Soeur Claudine remercia chaleureusement Monsieur  le Consul "...Tout d’abord, permettez-moi de vous remercier d’être là ce soir, ainsi que les membres du Consulat qui vous accompagnent. Je vous remercie aussi de cette distinction qui, je dois vous le dire, m’a d’abord laissée confuse, car si c’est avec joie que je me donne à l’enseignement du français, je connais aussi mes limites. Et cette reconnaissance que vous me manifestez aujourd’hui, je voudrais la partager, car on ne fait rien seul, et nous sommes nombreux, « embarqués » depuis plus de 10 ans dans cette aventure du français à Taybeh. Je mentionne d’abord ma congrégation : Vous savez que nous avons été fondées par le Père Jacques Sevin , fondateur du scoutisme catholique et que notre mission est principalement tournée vers le monde des jeunes. Par l’enseignement du français en contexte scolaire, mais aussi par les activités en langue française qui ont lieu chaque été nous pouvons couler dans une même veine, notre charisme, la pédagogie scoute, et le service de l’enseignement du français. Je voudrais aussi remercier le Patriarcat latin de Jérusalem, la Paroisse,  et l’école,  qui nous ont donné l’opportunité de participer  à ce service de l’éducation.

Dans une situation où pèsent tant d’incertitudes sur l’avenir des jeunes palestiniens, leur proposer d’apprendre une autre langue, c’est ouvrir une porte de plus pour leur avenir. Bien sûr, nos moyens en nombre d’heures de cours sont limités, nous ne prétendons pas amener tous les élèves à un niveau d’autonomie en langue française, mais Taybeh est aussi le village où passent beaucoup de pèlerins français, et si les uns et les autres peuvent échanger quelques mots, c’est pour les jeunes, une ouverture  positive. Je voudrais aussi remercier ma communauté, car pour ne parler que des sessions de français, elles supposent en amont un long travail de préparation, de logistique, et là, je peux vous assurer que nous sommes toutes les quatre,  bien concernées. Et ce qui nous encourage à aller de l’avant, c’est que depuis peu, Sr Nelly partage avec moi quelques heures d’enseignement et l’animation des activités extra scolaires. Je remercie aussi les élèves, ceux qui sont là ce soir et ceux qui ne sont pas là , pour leur dynamisme et leur motivation, ceux qui ,élèves de l’école ou anciens élèves aujourd’hui en université  font visiter leur village aux pèlerins  francophones. Par là, ils donnent aux plus jeunes, une visibilité de l’atout qu’apporte une compétence linguistique.

Enfin, je voudrais aussi remercier le Consulat de France et son Service d’activités culturelles. Si, par 3 fois, nous avons pu organiser et accompagner un séjour linguistique pour des élèves de 10ème et 11ème, si  nous pouvons chaque année aborder  avec confiance  la mise en place d’une  session de français qui requiert la présence d’une douzaine d’animateurs et animatrices venant de  France,  si nous avons au DELF des résultats honorables ( sans être 100%), c’est parce que nous avons toujours reçu du SCAC un soutien pédagogique et matériel.Monsieur le Consul Général de France, je vous remercie  de ce soutien et de l’attention  que vous portez à notre communauté, à notre école, à notre village.

Suivi alors un sympathique MERCI  de Kassam, le premier élève de soeur Claudine, en Français, aujourd'hui à l'Université de BirZeit, après un an , en France, à Sciences Po : Quand j’ai appris la nouvelle que ce prix a été attribué à Sœur Claudine, la première chose qui m’est venue à l’esprit était le mot « remerciement ». Car pour beaucoup d’entre nous, ce que nous faisons ce soir s’agit d’un remerciement à Sœur Claudine. Un remerciement pour ses efforts, pour sa patience et pour son travail toujours modeste, mais toujours constant. Le travail de sœur Claudine nous a donné à un large groupe d’étudiants à Taybeh, l’opportunité de découvrir une nouvelle langue, et alors une nouvelle culture, la française, différente de notre culture arabe. En plus l’opportunité d’être nous-mêmes, des points de rencontre et d’échange entre ces deux cultures. Un des anciens de Taybeh disait que « chaque langue vaut pour une personne ». Dans ce sens, je peux dire que sœur Claudine nous a aussi aidés à nous faire valoir davantage. C’est pour tout cela que ce soir, je veux exprimer mon remerciement à sœur Claudine ; au nom de tous ceux qui ont appris et continuent à apprendre le français à Taybeh, à l’école, aus sessions de Français, aux cours du DELF et ceux qui ont voyagé en France : Sœur Claudine, MERCI ! Du plus profond de nos cœurs !

Des danses palestiennes et des chants en français puis un buffet installé au Centre Charles de Foucauld permirent ensuite  à tous de manifester leur joie... 

01 Octobre 2011

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